Livraison urbaine décarbonée : 6 questions sur l'usage des véhicules utilitaires

Très utilisés pour la livraison du dernier kilomètre, les véhicules utilitaires légers sont particulièrement adaptés au transport de biens et de marchandises en ville. De l’alimentaire aux petits et moyens colis ou au matériel, leur usage couvre un large champ de secteurs professionnels et place la question de leur verdissement comme un réel levier vers une logistique urbaine plus durable. Premiers pas dans la transition énergétique des véhicules utilitaires légers, un sujet en 6 questions à démystifier et à éclairer selon les usages des professionnels.

1/ C’est quoi une flotte plus propre ?

Verdir sa flotte consiste à changer l’énergie d’alimentation de ses véhicules pour une énergie plus respectueuse de l’environnement. Que cherche-t-on à réduire en parlant de flotte « plus propre » ?

Réduction des émissions de gaz à effet de serre : pour un enjeu environnemental

Dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4), protoxyde d’azote (N2O), ozone (O3)… les gaz à effet de serre sont les principaux responsables du réchauffement climatique, aux importantes conséquences sur nos équilibres écologiques (acidification des océans, intensification des incidents météorologiques, bouleversement des écosystèmes…).

Dans le domaine du transport de marchandises, les émissions sont générées par la combustion des carburants fossiles : choisir un VUL à énergie verte permet de réduire ces rejets à l’atmosphère et de limiter son impact environnemental.

Réduction des émissions de polluants atmosphériques : pour un enjeu sanitaire

Caractérisées par un diamètre inférieur à 2,5 microns, les particules fines sont des polluants qui pénètrent dans l’organisme. Elles peuvent avoir des conséquences à court et à long terme sur la santé : impact sur la perte d’espérance de vie et la mortalité, développement de maladies cardiovasculaires, maladies respiratoires ou cancer du poumon (près de 40 000 décès dus à l’exposition aux particules fines en France chaque année d’après Santé publique France). Outre ces particules fines, la pollution de l’air est caractérisée par la présence de gaz nocifs (oxydes d’azote, composés organiques volatils, ammoniac, …) qui ont également des effets sur la santé.

Réfléchir dès à présent au verdissement de sa flotte par la réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques est un acte écologique, mais également sanitaire.

2/ Posséder un véhicule plus propre, quels autres bénéfices ?

Faire reconnaître son véhicule propre : la vignette Crit’Air

Les véhicules peu émetteurs de polluants de l’air sont identifiables grâce au certificat qualité de l’air Crit'Air, une vignette sécurisée indiquant la classe environnementale du véhicule à coller sur le pare-brise. Sa possession n’est pas obligatoire, sauf dans certaines zones aux réglementations de circulation spécifiques.

> Il est recommandé d’acheter la vignette sur le site internet officiel Certificat Qualité de l'air  (prix fixé à 3,11 €). Il existe en effet des sites peu scrupuleux qui surfacturent le même service (le tarif pouvant dépasser les 15 €).

Avantages réglementaires des vignettes Crit’Air

Les vignettes verte et 1 favorisent les véhicules les moins polluants : modalités de stationnement et conditions de circulation privilégiées, possibilité de circuler dans les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) ou en cas de pic de pollution.

Zones à faibles émissions mobilité

Les ZFE-m restreignent ou interdisent l’accès aux centres-villes à certains véhicules selon leur vignette Crit’Air. Elles vont se multiplier dans les années à venir. Anticiper ces contraintes et penser dès à présent à acquérir un véhicule vert est donc primordial au vu des enjeux réglementaires en place.

À lire, ZFE-m : réponse à une urgence sanitaire

3/ Quelles sont les énergies disponibles ?

Actuellement, il existe différentes énergies alternatives pour le marché des véhicules utilitaires légers : gaz naturel, électricité, biocarburants, hydrogène. Pour une solution applicable à court terme parmi ces différentes énergies alternatives déployées, la maturité des véhicules existants incite à prioriser les offres VUL électriques et gaz naturel, aujourd’hui commercialisées et diversifiées bien que la production reste très limitée et les délais de commande longs.

Gaz naturel véhicule (GNV) ou biométhane (bioGNV)

Le GNV est une énergie fossile composée d’hydrocarbures et très majoritairement de méthane (CH4) sous forme gazeuse. Le bioGNV est une alternative renouvelable au GNV. Il s’agit d‘un gaz identique mais issu de la valorisation des déchets organiques (méthanisation), bien plus neutre en émissions de GES.

(-) Bien que moins émetteur de GES que le diesel ou l’essence, le GNV n’en demeure pas moins une énergie fossile et contribue donc au réchauffement climatique.

(+) Il permet un vrai gain dans la réduction des particules fines émises.

(+) Technologie mature qui fonctionne avec de classiques moteurs thermiques, ce qui rend possible l’adaptation d’un moteur diesel à cet usage.

(+) Un véhicule roulant au GNV et bioGNV est catégorisé Crit’Air 1 sous réserve de sa première date d’immatriculation

Véhicule électrique

Les VUL électriques sont équipés d’une batterie qui stocke l’énergie nécessaire à l’alimentation du moteur électrique.

(-) La production du véhicule et de la batterie a un impact environnemental non négligeable, dû aux émissions de GES induites et à l’utilisation de matériaux rares.

(-) La recharge de ces véhicules implique, en France, un recours à une énergie peu émettrice de GES, le nucléaire, mais non renouvelable.

(+) Les émissions de GES et de particules fines au pot d’échappement sont nulles.

(+) La technologie est mature et avec des variantes : véhicule 100% électrique, retrofit (conversion d’un véhicule thermique), véhicule hybride (rechargeable ou non rechargeable)…

(+) Le véhicule électrique est catégorisé Crit’Air 1.

L’hydrogène, une solution d’avenir ?

Cette technologie, en plein développement et très prometteuse, utilise une pile à combustible qui transforme l’hydrogène (H2) gazeux en électricité directement au sein du véhicule. Sans émissions au pot d’échappement, cette alternative serait plus autonome et simple en recharge que le véhicule électrique.

Cependant, la maturité insuffisante à l’heure actuelle de la production vertueuse de cette énergie (produite principalement à partir d’énergies fossiles) et des véhicules adaptés ne permet pas de placer l’hydrogène comme une solution dans un futur proche.

4/ Pour quels usages ?

Les professionnels qui souhaitent acquérir un VUL propre doivent tenir compte de plusieurs paramètres pour identifier l’énergie la plus adaptée à leur activité.

L’autonomie nécessaire et les moyens d’avitaillement sur le territoire

Le nombre de kilomètres à parcourir impacte fortement l’orientation du verdissement de sa flotte. Un véhicule électrique possède une autonomie inférieure à celle d’un véhicule (bio)GNV, et cela implique de se poser la question du temps de recharge nécessaire et de connaître l’utilisation de son véhicule. Ce dernier pouvant avoir des besoins en recharge fréquent, il est préférable que les usages soient adaptés avec de courts trajets et avec des horaires autorisant des temps d’arrêt.

Directement lié à l’autonomie, la question de la recharge est aussi un facteur clé, et un des premiers obstacles au changement de véhicule. A l’inverse du diesel que l’on trouve facilement dans les 11000 stations-services implantées sur les territoires, les énergies alternatives ne bénéficient pas d’un maillage d’avitaillement dense et homogène. Les volontés de déploiement et d’investissement des mobilités gaz, électrique ou hydrogène, sont différentes selon les régions voire les départements. Il est donc primordial d’être renseigné sur l’infrastructure existante en lien avec le type d’énergie choisie, pour s’assurer que celle-ci est cohérente avec les besoins en recharge naissant des usages et itinéraires.

Le type de marchandises ou biens transportés

Le type de marchandises peut jouer sur l’autonomie du véhicule. A titre d’exemple, les produits frais nécessitant un équipement frigorifique, le poids du véhicule à vide (PV) est par conséquent plus lourd, ce qui entraîne une consommation plus importante et réduit l’autonomie. Une réflexion sur le poids des marchandises ou biens transportés, la charge utile (CU), est aussi à mener.

Au moment d’une réflexion sur l’acquisition d’un véhicule propre, il faudra donc être vigilant au poids total autorisé en charge (PTAC = PV + CU).

Choisir un véhicule alternatif n’est pas purement un choix technique et matériel, mais est fonction des usages associés. L’autonomie nécessaire à l’utilisation qui est faite du véhicule (régie par l’organisation des déplacements, le type de charge, les infrastructures de recharge disponibles…) est spécifique à chaque usage et viendra spécifier une orientation vers l’énergie adaptée.

Une offre en pleine expansion
Gaz naturel
. En mai 2021, 156 stations GNV sont ouvertes en France. 95 projets de nouvelles stations ont été lancés et 38 nouvelles implantations sont à l’étude.

Bornes électriques. Près de 30 000 points de charge étaient ouverts au public en mars 2020, et 5000 nouvelles bornes sont mises en service chaque année. La moitié d’entre eux sont implantés sur la voie publique. D’ici 2022, le gouvernement ambitionne d’atteindre 100 000 bornes publiques. Deux types de bornes existent, les bornes à charge rapide utilisées lors de longs déplacements (6 % de l’ensemble du parc en France), et les bornes classiques, plus adaptées aux tournées en centre-ville. Les modalités d’utilisation (abonnement, paiement par carte spécifique…) et leur état de fonctionnement peuvent cependant être un frein à la recharge.

5/ Quelles aides à l’achat ?

Les professionnels qui souhaitent acquérir (achat ou location) un VUL à faibles émissions peuvent bénéficier de certaines aides financières nationales. Ces aides peuvent se cumuler entre elles ou être cumulées à des offres locales, c’est le cas par exemple à Paris, Grenoble ou en région PACA.

Prime à la conversion

Cette prime est destinée aux particuliers et aux professionnels qui souhaitent acheter un véhicule neuf ou d'occasion en échange de la mise au rebut de certains vieux véhicules. Pour les professionnels, son montant est par exemple compris entre 2500 et 5000 € pour l’achat d’un véhicule électrique ou d’un véhicule hybride rechargeable dont l’autonomie est supérieure à 50 km.

Un simulateur est disponible pour connaître son éligibilité.

Bonus écologique

Cumulable avec la prime à la conversion, le bonus écologique est une aide financière de l’État à l’achat ou la location d’une camionnette électrique ou hybride rechargeable. Son montant varie selon le prix et le type du véhicule. Il est par exemple plafonné à 5000 € pour l’acquisition d'un véhicule électrique neuf coûtant moins de 45000 € et émettant moins de 20 g/km de CO2 (consulter la fiche constructeur).

Au 1er juillet 2021, les montants du bonus écologique baisseront de 1 000 €. Plus d’informations sur le site Service public.

Prime au rétrofit électrique

Depuis le 1er juin 2020, une aide de 5000 € est accordée à tout propriétaire qui souhaite transformer le moteur thermique de son véhicule en moteur électrique. Pour en bénéficier, il faut :

  • être domicilié en France ;

  • avoir fait transformer le moteur thermique en moteur électrique à batterie ou à pile à combustible par un professionnel habilité ;

  • posséder le véhicule depuis au moins un an ;

  • ne pas le vendre dans les six mois suivant son achat ni avant d'avoir parcouru au moins 6000 km.

La demande d'aide s’effectue via le téléservice de la prime à la conversion, qui sera bientôt mis à jour pour accueillir les candidatures dédiées. Plus d’informations sur le site Service public.

Suramortissement

Il est possible de suramortir le coût d’achat ou de location d’un VUL neuf fonctionnant au (bio)GNV, à l’électricité ou à l’hydrogène. Pour les véhicules de 2,6 à 3,5 tonnes, le suramortissement est de 20 %. Peuvent bénéficier de ce dispositif les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu.

Les aides locales et régionales

L’énergéticien GRDF répertorie les aides destinées à l’achat d’un véhicule (bio)GNV. Son tableau est à jour au 8 janvier 2021.

Le site Je change ma voiture (https://jechangemavoiture.gouv.fr) liste en détail les aides locales disponibles pour l’achat d’un véhicule propre. Les aides sont classées par région.

6/ Quelle maintenance prévoir ?

Habitués jusqu’à présent à entretenir une flotte diesel, les professionnels du transport doivent désormais appréhender les nouvelles contraintes techniques inhérentes aux véhicules gaz et électriques.

(bio)GNV : un entretien proche du diesel

Concernant l’entretien des motorisations GNV, il existe peu de difficultés pour trouver un concessionnaire. Bien que la maintenance soit différente entre un véhicule (bio)GNV et un modèle diesel identique, la plupart des entretiens peuvent être réalisés par un atelier classique, sauf pour certaines interventions très spécifiques. L’entretien est un peu plus fréquent que pour un diesel, ce qui peut renchérir le coût de maintenance.

Électrique : une habilitation nécessaire

Les retours en termes de maintenance d’un véhicule électrique montrent que le coût de revient et d’exploitation est plus faible que pour un moteur thermique. Pour intervenir sur des modèles électriques, les techniciens doivent au préalable suivre une formation et obtenir une habilitation : il est nécessaire pour les constructeurs d’anticiper ce besoin en formation pour ne pas risquer une pénurie de main d’œuvre qualifiée. Il est donc conseillé, pour l’acquisition d’un véhicule électrique, de se renseigner sur la capacité des concessionnaires proches de son entreprise à assurer la maintenance dans des délais raisonnables.

S’intéresser à l’usure des batteries
Sachant que ces dernières impactent considérablement le coût final d’un véhicule « propre », il est nécessaire de bien étudier les offres des différents constructeurs relatives à l’entretien et au remplacement des batteries usagées. Certains constructeurs proposent par exemple une garantie de 8 ans ou 100 000 km.

Sur les territoires, quelles actions avec InTerLUD ?
Le programme InTerLUD, en faveur d’une logistique urbaine durable, propose aux collectivités un accompagnement sur le verdissement des flottes, incluant les véhicules utilitaires. En prônant une concertation représentative de tous les secteurs concernés, les principaux utilisateurs de VUL (commerçants, artisans, transporteurs…) prennent ainsi part aux questions de verdissement du transport de biens et de marchandises. Un travail conjoint entre acteurs privés et publics est proposé pour porter au mieux les réflexions sur l’acquisition de véhicules propres, des aides induites et des besoins en infrastructures ; mais aussi sur l’information et la sensibilisation liées à ce sujet, pour que toutes les parties prenantes puissent être incluses dans la démarche.


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