Le jeudi 23 mars, CAP Nord Martinique a accueilli à l’Amphithéâtre du Marigot, une quarantaine d’institutionnels et représentants des secteurs professionnels pour un évènement dédié à la logistique urbaine en Martinique. L’EPCI a lancé officiellement sa démarche dans le cadre du programme Innovations Territoriales et Logistique Urbaine Durable (InTerLUD), qui vise à la co-construction d’un plan d’actions pour répondre aux enjeux de son territoire en logistique urbaine. Il s’agissait pour les différents acteurs de se pencher sur “l’ensemble des activités qui optimisent les mouvements de marchandises (transports et stockages) dans les villes et apportent des réponses à l’économie locale et aux habitants”. Retour sur cet après-midi constructif de lancement de la démarche à CAP Nord Martinique, où chaque acteur public et secteur économique a pu mettre en lumière ses enjeux et échanger à l’amélioration de la logistique urbaine en Martinique.
Christian PALIN, Élu à la Commission du développement économique de CAP Nord Martinique, a introduit l’atelier et insisté sur la volonté de la collectivité de travailler à l’amélioration de la logistique urbaine et à la revitalisation du territoire. Il a exprimé le réel plaisir d’accueillir l’ensemble des parties prenantes de la logistique urbaine de Martinique, qu’ils remercient pour leur présence et leur volonté de participer à la construction d’une logistique urbaine plus durable à CAP Nord Martinique.
Il annonce ainsi que la collectivité a signé une convention dès 2021 afin d’être accompagnée financièrement, humainement et méthodologiquement pour mettre en place une charte de logistique urbaine durable co-construite entre les acteurs publics et privés – de tous secteurs – à travers le programme InTerLUD.
Afin de disposer d’une vision plus précise et chiffrée des enjeux du territoire de CAP Nord en logistique urbaine, les échanges ont été introduits par Philippe DUONG, auteur du rapport sur l’Etat des lieux du transport de marchandises et de la logistique en Martinique (Samarcande, 2015). Il a ainsi mis en lumière les spécificités propres de la Martinique et de CAP Nord Martinique en particulier, par exemple les très grandes distances d’approvisionnement et de dépendance avec la France hexagonale, une concentration économique sur le centre de l’île, ainsi qu’une typographie qui ne facilite parfois pas les échanges.
Après la présentation d’éléments de diagnostic à l’échelle de l’île, Sébastien DESROQUES, Chargé de mission chez Logistic Low Carbon et Marion COTTET, Cheffe de projet logistique urbaine au Cerema, sont revenus sur les objectifs du programme et la construction d’une gouvernance pérenne public-privé chargée de la construction de la charte, la mise en œuvre des actions qu’elle prévoit, et leur suivi.
Le Cerema, accompagne les collectivités par de l’ingénierie, du financement et de la méthodologie
Logistic Low Carbon accompagne les acteurs économiques et leurs représentants, pour s’assurer qu’ils soient partie prenante, dès le lancement de la démarche locale, de la construction du plan d’actions.
Ils rappellent que si 41 collectivités de France hexagonale et d’Outre-Mer sont engagées dans InTerLUD, nous arriverons bien à 41 chartes locales et différentes les unes des autres, destinées chacune à répondre aux enjeux spécifiques des territoires, co-construites entre les acteurs publics et privés. Ils ont enfin précisé que le programme InTerLUD, qui deviendra LUD+ à partir de mai 2023, permettra d’accompagner d’autres collectivités jusqu’à l’élaboration des chartes, et de co-financer des actions inscrites par les acteurs dans les plans d’actions.
Yannick MATHURINA, Chargé de mission logistique urbaine et mobilités durables à CAP Nord Martinique, est revenu sur les spécificités du nord de la Martinique, comme les risques naturels et aléas climatiques, le déficit de foncier dédié à la logistique urbaine, les carrières, une règlementation non harmonisée entre les centres-bourgs, le coût de la livraison qui est 25 à 30% plus élevé que dans le reste de l’île ; autant de sujets qui constituent en même temps des opportunités pour le dynamisme du territoire. Il précise les enjeux de la collectivité, à savoir l’accompagnement des nouveaux modes de vie, le renforcement de l’écosystème positif pour le développement économique et la réduction des coûts liés à l’énergie, enfin l’accompagnement des acteurs économiques notamment ceux en lien avec le “grenier agricole”.
Pour cela, CAP Nord Martinique est accompagnée par InTerLUD, dont la première étape consistera à réaliser dans les semaines à venir un diagnostic des flux de marchandises sur le territoire, avec un bureau d’études recruté, et des entretiens de Logistic Low Carbon avec les acteurs économiques. La collectivité invite ainsi tous les secteurs professionnels à participer à la démarche, de la réalisation d’un diagnostic jusqu’à l’élaboration de la charte, sa mise en œuvre et le suivi du plan d’actions.
Parmi les accompagnements proposés aux acteurs du transport de la logistique, Anabelle VIGILANT, Ingénieure Approches Territoriales intégrées Climat Air Energie Mobilité Observation à l’ADEME, et Cyrille LIROY, Chef du service Transports Mobilité Sécurité à la DEAL Martinique, ont présenté le dispositif EVE (Engagements Volontaires pour l’Environnement), lequel permet d’accompagner les entreprises dans la réduction de l’impact énergétique et environnemental de leurs activités de transport et logistique. Son objectif est d’éviter l’émission de plus de 3 millions de tonnes de CO2 supplémentaires par an par l’accompagnement des chargeurs, commissionnaires de transport, les transporteurs routiers de marchandises et de voyageurs. Ils rappellent ainsi tout deux l’enjeu à ce que les acteurs du transport s’engagent dans les démarches EVE et InTerLUD, en ce que cela permettra d’améliorer la qualité de l’air en Martinique. Pour la période actuelle de la démarche EVE (2021-2024), 3 entreprises martiniquaises sont déjà signataires (Ecompagnie, EVEA et Seen Environnement SA).
Lors d’une table ronde animée par Elsa CORBIN, Directrice de l’IUT de la Martinique, les représentants des acteurs économiques : logistique alimentaire et circuits courts, bâtiment-travaux publics, commerce, transporteurs, ont pu exprimer leurs enjeux et proposer des pistes de solutions en logistique urbaine durable. Ils ont par ailleurs rappelé l’importance de travailler avec la collectivité et l’ensemble des filières professionnelles.
Méliana GUINOT, Animatrice du programme LEADER, a présenté cette démarche en faveur du développement rural, pour inciter et aider les acteurs ruraux à réfléchir au potentiel de leur territoire, sur des territoires aux multiples ressources et pour des secteurs d’activités diversifiés. A travers un volet agricole, le programme LEADER facilite la mise en réseau des agriculteurs et soutien les initiatives innovantes, comme les circuits courts, la vente directe ou la promotion d’une marque spécifique du nord de la Martinique.
Ensuite, André-Judes CADASSE, Co-fondateur de Petit Cocotier, une ferme alimentaire située au Morne-Rouge où sont cultivés des fruits et légumes frais, sans pesticides ni intrants de synthèse, a insisté sur la nécessité de recréer du sens, du lien et de la logique entre chacun des acteurs. Il en appelle à une souveraineté alimentaire et à la mutualisation des données pour améliorer le suivi, le contrôle et la performance des produits, et rappelle la capacité des acteurs locaux à être innovants et à participer au développement économique du territoire. Il salue l’engagement de CAP Nord dans des projets tels qu’InTerLUD en ce qu’ils recréent du lien, et attend désormais de démarrer, ensemble.
Jean-Yves PETER, Manager intercommunal des centres-bourgs de CAP Nord Martinique, a exprimé les besoins des commerçants de la collectivité s’agissant de logistique urbaine. Il a insisté sur la nécessité de disposer de davantage d’aires de livraisons ou de stationnement, d’une signalétique performante, et de revoir les conditions de marche des piétons et des arrêts de bus. Autant d’éléments non optimisés qui, une fois traités, contribueront à la revitalisation des centres-bourgs. Enfin, il est revenu sur le travail qu’il réalise pour réunir les commerçants des centres-bourgs du nord en associations, ce qui leur permet à l’échelle de chaque bourg de mettre en place des actions communes, telles que des commandes groupées pour faire des économies sur le coût du transport. De même, ces associations seront des structures primordiales pour faire vivre la parole des commerçants et et restituer leurs enjeux, afin de construire un plan d’actions qui doit répondre à leurs problématiques.
Jean-Yves BONNAIRE, Secrétaire Général de la Fédération Régionale du Bâtiment et Travaux Publics (FRBTP) de la Martinique, a détaillé les enjeux prioritaires de la filière à CAP Nord Martinique, tels que l’accès aux centres-bourgs pour les chantiers urbains et l’approvisionnement en matériaux et éléments préfabriqués, la fermeture de chemins et voiries pour la réalisation des chantiers en toute sécurité, ou l’autorisation temporaire d’occupation de voiries pour les chantiers urbains de bâtiment, et les carrières à Saint-Pierre qui concourent à des travaux sur toute l’île et engendrent un trafic de poids lourd qui créent des nuisances sonores.
Il souhaite que le secteur BTP ait un impact positif pour améliorer la logistique, rappelant ainsi les engagements du secteur en mettant en place une commission pour la REP Produits et Matériaux de Construction du secteur du Bâtiment (PMCB) et recommande de réfléchir à la manière de mener les chantiers dans des environnements contraints, tout en prenant en compte les enjeux sociaux dans les projets pour optimiser la logistique.
Enfin, Serge LANGOZ, Président du Cluster GAT Caraïbes et Erika BEROARD, Consultante Supply Chain au Cluster, ont rappelé les enjeux forts du dernier kilomètre en Martinique et la nécessité de mutualiser les livraisons. Le cluster GAT Caraïbes s’ouvre sur la supply chain pour repenser les coûts logistiques ainsi que toute la chaine d’approvisionnement jusqu’au consommateur final. Ils rappellent qu’aujourd’hui, 57% des entreprises en Martinique externalisent le transport, contre 80 % en métropole. Tout repose sur la connaissance des données des entreprises, la mise en place de stratégies d’entreprises pour faire des économies d’échelle et le besoin de faire comprendre aux entreprises qu’il y a un intérêt à mutualiser.
Puis, Sandra CASANOVA, Présidente de la Commission Stratégies logistiques de la Collectivité Territoriale de Martinique, Véronique LAGRANGE, Directrice-adjointe de la DEAL Martinique, Régine LEBEL, Directrice générale de Martinique Transport, et Cynthia JEAN-BAPTISTE RÉGIS, Directrice de l’Aménagement, de l’Habitat et des Infrastructures de CAP Nord Martinique, ont toutes convergé sur l’intérêt pour le territoire de suivre la démarche InTerLUD initiée par CAP Nord Martinique, et ont souligné l’intérêt pour la Martinique de se doter d’une logistique urbaine plus durable et performante, en concertation avec les acteurs publics et privés du territoire.
Elles ont rappelé le contexte de responsabilité partagée entre les acteurs publics et les acteurs privés et salué la démarche InTerLUD de co-construction d’une charte pour tendre vers la sobriété, l’efficacité énergétique et la performance logistique des entreprises.
En travaillant tous ensemble à l’amélioration de la logistique, nous répondrons ensemble au enjeux sociaux, économiques et environnementaux, ce qui implique de travailler de manière collaborative, innovante, et en toute transparence entre les acteurs des différentes collectivités. La création d’une commission « Stratégies logistiques » à la Collectivité Territoriale de Martinique est l’illustration de cet engagement envers une logistique urbaine plus efficiente et durable.
Enfin, Cynthia JEAN-BAPTISTE RÉGIS remercie l’ensemble des participants – représentants de toutes les institutions publiques et secteurs professionnels de la Martinique – invitant désormais chacun à s’inscrire dans cette démarche pour aller ensemble vers des actions opérationnelles.
Pour cela, on se donne rendez-vous dans les semaines à venir pour alimenter ensemble le diagnostic des flux et des enjeux du territoire de CAP Nord, première étape pour disposer d’une vision fine et partagée des problématiques du terrain, avant de réfléchir ensemble au plan d’actions opérationnel.
Nos remerciements les plus sincères à Elsa CORBIN, pour l’honneur qu’elle nous a fait d’animer cette table ronde très riche et la pertinence de ses interventions, à Justine VAHALA pour la finesse de son buffet, à David LANISTA pour la qualité de ses photos, à tous les intervenants pour leur expertise, leur engagement et l’excellence de leur présentation, la DEAL Martinique, la Collectivité Territoriale de Martinique, Martinique Transport, l’ADEME, ainsi qu’à chaque participant pour leur volonté de s’inscrire dans la démarche InTerLUD.